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Nausicaa rentra au manoir de son père et gagna sa chambre où sa vieille nourrice Euryméduse alluma le feu.
Ulysse arriva à son tour en ville, dissimulé par une nuée dont Athéna l’avait recouvert. La déesse prit alors l’apparence d’une enfant phéacienne et se mit en travers de son chemin. Le héros lui ayant demandé sa route, elle se proposa pour l’accompagner. Elle lui raconta que Poséidon avait permis à leur peuple doté de vaisseaux aussi rapides que la pensée d’être « les passeurs du grand abîme ».
Puis elle exposa la filiation de la reine Arèté, nièce de Nausithoos :
Poséidon avait épousé Péribée « la plus belle des femmes », fille d’Eurymédon. Celui-ci était le roi des présomptueux géants et causa la perte de son peuple ainsi que la sienne. De leur union naquit Nausithoos qui eut à son tour deux enfants, Alcinoos et Rhexénor. Ce dernier à peine marié fut tué par Apollon, mais il laissait une fille Arèté que son frère épousa. Arèté était aimée de tous, plus honorée par son époux que jamais femme ne le fut, et sa bonté apaisait les querelles.
Nausicaa avait affirmé à Ulysse que seule la bienveillance de sa mère Arèté lui permettrait de regagner son foyer. À son arrivée au palais, le héros fut émerveillé par la lumière qui tombait d’en haut, comme un éclat de soleil ou de lune. A chaque porte de la muraille, deux chiens immortels et jeunes à tout jamais, d’or et d’argent, œuvres d’Héphaïstos, gardaient la demeure du roi. Des éphèbes d’or tenaient des torches. Des cinquante servantes du palais, les unes sous la meule écrasaient le blé d’or et les autres s’adonnaient au tissage. Jamais femmes ne furent meilleures que les Phéaciennes pour cet art car Athéna leur avait accordé la droiture du cœur et l’adresse des mains. Des vergers remplis de poiriers, de grenadiers, de pommiers, de figuiers et d’oliviers, ainsi qu’une vigne et un potager produisaient des fruits et des légumes à longueur d’année.
Toujours dissimulé par une nuée, Ulysse entra dans la grand-salle et vit les rois de Phéacie buvant en l’honneur d’Hermès. Puis il passa devant le roi Alcinoos et se jeta directement aux genoux de la reine Arèté qui enroulait sur sa quenouille les belles laines teintes du pourpre de la mer.
La nuée alors se dissipa. Le héros supplia l’assemblée de le ramener au pays de ses pères puis s’assit dans la cendre du foyer.
Échénéos, le plus âgé des Phéaciens, qui savait tant de choses d’autrefois, pria Alcinoos d’offrir un siège à leur hôte.
Le roi lui donna alors la place de son fils qu’il aimait entre tous. Puis il accéda à la demande d’Ulysse et décida une grande fête pour le lendemain, avant que ses passeurs ne le reconduisent en sécurité en son pays.
Ulysse n’ayant pas encore révélé son identité, il suggéra qu’il était peut-être un immortel que les dieux leur envoyaient pour quelque nouveau dessein, comme ils avaient coutume de le faire par le passé. Les dieux en effet partageaient souvent leur table ou les croisaient sur la route, car les Phéaciens étaient proches d’eux, tout comme les Cyclopes et les sauvages Géants. Mais Ulysse le détrompa, demanda à se restaurer car il ne pouvait échapper à sa nature humaine, et pressa ses hôtes de préparer son départ dès l’aurore.
Tous partirent se coucher à l’exception d’Alcinoos, d’Arèté et d’Ulysse. La reine, ayant reconnu les vêtements tissés par ses femmes, interrogea le héros avec des paroles ailées.
Ulysse lui conta alors la fin de ses aventures depuis son séjour chez Calypso.
Comme Alcinoos regrettait que ce ne fût pas sa fille qui l’ait amené en son palais, Ulysse l’assura qu’il l’avait voulu ainsi.
Alors le roi, non sans lui avoir dit qu’il aurait aimé en faire son gendre, décida son retour pour le lendemain. Ses passeurs le conduiraient aussi loin qu’il le désirerait, même au-delà de l’Eubée que ses gens situaient au bout des mers. Alcinoos l’avertit aussi qu’il serait endormi pendant le voyage.
Ulysse fit alors une prière à Zeus pour que les paroles d’Alcinoos se réalisent pour la plus grande gloire de ce dernier, puis il alla se coucher dans un lit préparé pour lui avec des draps de pourpre.
La « ce qui poursuit le chemin avec feu » et « l’acte pur » ont été préparés depuis longtemps par un yoga « qui prend soin de tout, qui ne laisse rien de côté », c’est-à-dire qui met de la conscience en tout (Nausicaa aux bras blancs a eu pour nourrice Euryméduse).
Le maître du yoga, expression du supraconscient, fait en sorte que le contact s’établisse facilement avec « ce qui permet le passage », en offrant, pour la dernière fois, son aide pour la réalisation de l’Unité supramentale (Athéna enveloppa Ulysse d’une nuée car les Phéaciens ne faisaient pas bon accueil aux étrangers). Par une intuition pure, donc non déformée, le chercheur est informé qu’il est parvenu aux abords du « grand abîme » qui marque la frontière entre le surmental et le supramental, un passage dans une autre réalité. Son franchissement, encore contrôlé par des forces issues du subconscient, n’est permis qu’à ceux qui peuvent laisser la lumière les traverser sans y opposer aucun obstacle, sans faire aucune ombre (une petite fille guide Ulysse et l’informe que Poséidon a concédé « le grand abîme » aux passeurs de son peuple). Il lui est confirmé que les moyens du passage ne relèvent plus du mental et fonctionnent dans un temps instantané (les navires phéaciens sont « plus rapides que l’aile ou la pensée »).
La filiation d’Arèté indiquée par Homère peut être comprise comme l’évolution au cours des âges de l’accès humain au « Pouvoir » supramental qui est celui de la transformation. Nous en donnons ci-après notre compréhension sous toute réserve.
Eurymédon « un vaste pouvoir » était le roi des Géants, lesquels sont associés « au pouvoir d’action