LE MYTHE D’EUROPE

 

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Dans son aphorisme 76, Sri Aurobindo dit : « l’Europe se vante de son organisation et de son efficacité pratique et scientifique. J’attends que son organisation soit parfaite, alors un enfant la détruira. ».

Quand on a demandé à Mère de commenter cet aphorisme, elle a dit (Agenda, 11 décembre 71) : « Naturellement, ce n’est pas le sol qui sera détruit c’est simplement le pouvoir qui est détruit, parce que la terre, on ne la détruit pas ».

J’ai commencé par cette citation pour vous dire que ce n’est pas du tout le sujet de la conférence. Nous ne nous intéresserons pas à l’Europe sous son aspect de rayonnement dans le monde ou de pouvoir – ou plutôt de perte de pouvoir, ce qui devient de plus en plus évident au fil du temps –, mais plutôt à ce qu’est l’âme de l’Europe ; à sa mission telle que la voyaient les anciens Grecs.

Quelle était sa mission définie il y a près de 5.000 ans, quelle fonction devait-elle remplir dans l’évolution du monde ? Nous allons tenter d’y répondre à la lumière de la mythologie grecque.

Bien sûr on pourrait dire que c’est un hasard si le territoire qu’on appelle aujourd’hui l’Europe a pris ce nom et qu’il n’est pas fondé d’y voir une relation avec la mythologie grecque. Mais nous pensons que le hasard n’existe pas et que ce n’est donc pas un « hasard » si ce territoire s’appelle Europe. Si tout le monde s’accorde pour dire que ce nom vient du mythe d’Europe dans la mythologie grecque, il y a sûrement une raison à cela.

Pour ceux qui ne me connaissent pas, j’ai travaillé pendant près de 30 ans à une interprétation de la mythologie grecque, j’ai écrit plusieurs volumes à ce sujet et c’est sur la base de ces recherches que je vais aborder le mythe d’Europe.

Commençons donc par voir ce que raconte le mythe : 

Europe était une très belle princesse phénicienne et comme elle était très belle, Zeus, le roi des dieux, en tomba amoureux. Tandis qu’elle se promenait avec ses suivantes sur une plage de Phénicie, Zeus prit la forme d’un magnifique taureau blanc et vint s’allonger à côté d’elle. Europe qui n’était pas méfiante caressa le taureau et monta sur son dos. Zeus entra aussitôt dans la mer et l’emporta jusqu’en Crète. Là, il reprit sa forme divine, sous une apparence humaine, et Europe lui donna deux enfants, Minos et Rhadamanthe.

Voilà le mythe, il est très court et il ne nous dit pas grand-chose, si ce n’est qu’Europe vivait quelque part en Orient – nous verrons tout à l’heure où était la Phénicie –, qu’elle était très belle et que c’était une princesse. On n’en sait pas beaucoup plus.

Quand on étudie la mythologie grecque, on ne peut comprendre un mythe si on ne regarde pas la généalogie dans laquelle ce mythe s’intègre – sinon on peut lui faire dire n’importe quoi comme Freud l’a d’ailleurs fait en prenant le mythe d’Œdipe pour illustrer sa thèse sur la psychanalyse. C’est donc ce que nous allons regarder en premier pour essayer de comprendre où se situe ce mythe.

Il y avait chez les Grecs deux grandes lignées. La première – la lignée de Japet – correspond à l’évolution de la conscience mentale selon les sept plans de conscience que Sri Aurobindo a décrits et que certains connaissent peut-être. Ils sont représentés par les 7 Pléiades. Cette lignée correspond à l’ascension des plans de conscience et c’est dans cette lignée que l’on trouve de grands héros tels Bellérophon, Hector et beaucoup d’autres.

L’autre domaine de travail que Sri Aurobindo nous a indiqué – la lignée d’Océanos à laquelle appartient Europe – illustre un processus de purification/libération qui a pour objectif de purifier les traces de l’évolution qui fut dirigée par la Nature depuis l’origine de la terre.

La progression s’effectue par une série d’innombrables ascensions/purifications, les deux processus étant en partie liés : plus on monte haut, plus on peut descendre pour purifier et libérer.

Avec Océanos, nous sommes dans le processus de purification. Il commence avec Inachos dont le nom veut dire « évolution de la concentration » – notons au passage que tout le processus de purification est basé, selon les Grecs, sur un développement progressif de la concentration.

Le fils d’Inachos, Épaphos, dont le nom signifie « contact du divin », évoque une première expérience spirituelle. Elle se produit quand, par exemple, dans l’enfance, on a une expérience de « ce qui est Réel », une expérience de « Ça existe », quelque chose d’inhabituel et d’extraordinaire qui nous surprend vraiment.

Et c’est cette expérience, ce tout premier « contact avec le Divin » qui, un jour ou l’autre, nous mettra sur le chemin et enclenchera notre progression spirituelle. C’est cette expérience que l’on voudra retrouver avec le mythe de Jason en quête de la Toison d’Or, puis plus tard rendre permanente avec le mythe d’Ulysse.

Par ailleurs, nous pouvons remarquer que dans ce schéma généalogique on aborde aussi l’organisation de la spiritualité dominante selon les différentes régions de l’Antiquité.

La fille d’Épaphos eut des jumeaux, Agénor et Bélos. Le premier s’installa en Phénicie et eut deux enfants, Cadmos et Europe. Le second resta en Égypte et eut lui aussi des jumeaux, Danaos et Égyptos.

Quand il y a des jumeaux dans un arbre généalogique, cela signifie que les deux processus illustrés par leur descendance se produisent simultanément, c’est-à-dire que ce qui se développe avec Bélos se poursuit au même moment dans la descendance d’Agénor.

Avec Bélos, le mythe est relié aux Danaïdes dont vous avez peut-être entendu parler : les Danaïdes étaient des femmes dont le châtiment fut d’essayer de remplir un tonneau percé… indéfiniment. Voyons donc quel est ce mythe.

Cela se passe en ancienne Égypte, à environ 4, 5 ou 6.000 ans d’aujourd’hui. Égyptos a 50 fils et Danaos 50 filles. Dans la mythologie grecque les femmes indiquent des buts et des expériences (ou des réalisations quand elles ont une union