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Comme le jour se levait, le vaisseau de Télémaque approcha de Pylos. C’était la ville de Nélée et de son fils Nestor. Sur le rivage, de noirs taureaux étaient sacrifiés en l’honneur de Poséidon aux cheveux d’azur. Les Pyliens étaient répartis en groupes de cinq cents, avec neuf taureaux par groupe.
Athéna-Mentor entraîna Télémaque qui était intimidé et l’encouragea à questionner Nestor. Pisistrate, le fils de celui-ci, les accueillit et les plaça entre son père et son frère Thrasymède. Lorsque les prières rituelles à Poséidon furent finies, Télémaque demanda à Nestor qui avait déjà régné sur trois générations, des nouvelles de son père.
Nestor évoqua d’abord la mort d’Ajax, celle d’Achille et de Patrocle, ainsi que celle de son fils Antiloque. Puis il raconta la convocation de l’assemblée à Troie, les avis opposés d’Agamemnon et de Ménélas sur l’opportunité d’un départ hâtif en raison du courroux d’Athéna, sa traversée avec Ménélas et Ulysse jusqu’à Ténédos, le retour d’Ulysse à Troie pour apaiser Agamemnon, son propre départ de Ténédos avec Diomède et Ménélas, et enfin son arrivée à Pylos. Il était sans nouvelles d’Ulysse depuis que celui-ci avait rejoint Agamemnon.
Enfin, il donna les nouvelles qui lui étaient parvenues par la suite : le retour des Myrmidons sous la conduite de Néoptolème, ceux de Philoctète et d’Idoménée, celui d’Agamemnon tué par Égisthe dès son retour, le règne d’Égisthe pendant sept années et sa mort perpétrée la huitième année par Oreste, coïncidant exactement avec le retour de Ménélas d’Égypte.
Déplorant la conspiration des prétendants, il rappela comment Athéna avait veillé sur Ulysse et conseilla à Télémaque de se rendre chez Ménélas, le dernier à être revenu « d’un monde où l’on n’a pas grand espoir de retour une fois que les vents vous y ont égaré, un pays si loin dans la mer qu’on ne connaît pas d’oiseaux qui, dans la même année, refassent le voyage ». Au cas où Télémaque préférerait la route de terre à celle de mer, il proposa un attelage conduit par l’un de ses fils. Puis comme le soir tombait, il invita ses hôtes à dormir sous son toit. Mentor-Athéna déclina l’offre pour elle-même puis disparut en se changeant en orfraie au grand étonnement de tous. Nestor comprit alors que c’était Athéna qui assistait Télémaque et lui en fit part. Il promit en l’honneur de la déesse le sacrifice d’une vache d’un an, indomptée, aux cornes plaquées d’or. Il sollicita d’Athéna une bonne renommée pour lui-même, sa femme et ses enfants, et la déesse l’exauça.
Chacun s’en fut dormir. Pisistrate, le dernier des fils de Nestor non marié, resta auprès de Télémaque.
Dès l’aurore, Nestor s’installa sur le siège où son père jadis donnait des avis qui l’égalait aux dieux. Il était entouré de ses fils Échéphron, Stratios, Perséus, Arétos, Thrasimède et Pisistrate. Télémaque s’assit avec eux.
Nestor ordonna alors que l’on prépare le sacrifice promis et fit venir les marins du navire de Télémaque. Tandis que ses fils s’affairaient, Athéna vint jouir du sacrifice. Thrasimède frappa la bête de sa hache sous les clameurs des filles, des brus et de la femme de Nestor, la vieille reine Eurydice.
Télémaque, que la jolie Polycaste, fille de Nestor, avait baigné et frotté d’huile, revint partager le festin.
Puis lorsqu’ils eurent bien festoyé, Nestor ordonna à ses fils de préparer le char pour le départ de Télémaque. Celui-ci s’élança, accompagné de Pisistrate qui avait pris les rênes. Ils s’arrêtèrent pour la nuit à Phères, où Dioclès, fils d’Orsiloque et petit-fils d’Alphée, leur offrit l’hospitalité.
Pylos « la porte » est le symbole des passages remarquables du yoga. Le premier fut celui de l’entrée consciente dans le yoga personnel, lorsque Nélée « l’évolution vers la libération », le père de Nestor, fonda la ville de Pylos. Nous avons rencontré ce personnage, fils de Tyro et Poséidon, dans l’étude consacrée aux cinq premiers fils d’Éole. Il représentait, dans les débuts du yoga, un puissant mouvement d’évolution issu du subconscient. Il devait donner lieu à l’émergence d’un travail de « rectitude » ou « intégrité » ou encore « sincérité » (Nestor), l’un des piliers fondamentaux du yoga toujours nécessaire. Cela explique la très longue longévité de Nestor qui régna sur plus de trois générations.
La femme de Nestor, le but de cette sincérité, est logiquement Eurydice « la juste manière d’agir » ou « l’acte juste ».
La puissance spirituelle qui a œuvré depuis le subconscient est honorée pour son aide apportée tout au long de cette phase qui a permis de mener à bonne fin le yoga personnel jusqu’au surmental (Poséidon à la chevelure bleue). Car, dans le yoga du corps, les ébranlements ne viendront plus de Poséidon mais d’Hadès, non plus du subconscient mais de l’inconscient.
(Les groupes de cinq cents Pyliens symbolisent la perfection nécessaire, dans le monde des formes, pour passer la porte de la libération en l’esprit et la fin du yoga personnel, et les neuf taureaux par groupe, le temps de gestation de cette réalisation.)
Il est intéressant de noter qu’Homère n’a pas situé cette « porte » au moment du grand renversement du yoga, la victoire des Achéens dans la guerre de Troie qui ne constitue que la mi-parcours, mais une phase d’accomplissement symbolique plus tard (dix ans). Ce qui explique qu’Halithersès ait pu prédire vingt ans auparavant le retour d’Ulysse qui marque un second renversement (cf. le chant précédent).
Les combats du futur, qui se présentent devant l’être pacifié, participent à la fois de l’extrême « sincérité » (qui sera développée jusque dans le corps) et « d’un projet hardi », soit d’un grand courage et de l’acceptation d’un yoga très difficile (Télémaque est placé par Pisistrat