Les Argonautes et l’épreuve du désert

 

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Bien que parvenus aux abords de leur patrie, les héros durent encore subir d’autres épreuves aux confins de la Libye.

Alors que la terre de Pélops était en vue, ils furent malmenés par une tempête soulevée par Borée pendant neuf jours et autant de nuits. Ils furent emportés par les vents et la marée dans le golfe de la Syrte où la vase et les algues retiennent les navires, et s’y échouèrent.

Il n’y avait là nulle bête, nul oiseau. Le sable s’étendait aussi loin que le ciel. Les héros se désespéraient, livides et le cœur glacé, et même le pilote Ancaios pleurait. Ils se firent leurs adieux et chacun d’eux était prêt à rendre l’âme à l’écart. Tout n’était que plaintes et gémissements.

C’est alors que les déesses tutélaires de la Libye, « les glorieuses déesses des solitudes » qui affirmaient tout connaître des épreuves des Argonautes, apparurent à Jason, lui dirent de  cesser de gémir sur ses infortunes, et lui indiquèrent le signe du retour : « lorsqu’ils verraient Amphitrite dételer le char de Poséidon, alors ils devraient se remettre en route ». Mais Jason fut incapable de comprendre cette vision.

Quelque temps plus tard, un cheval colossal à la crinière d’or surgit de la mer et s’éloigna aussitôt dans un galop rapide comme le vent.

Les héros durent alors porter le navire sur leur dos à travers les dunes du désert de Libye pendant douze jours et douze nuits, réalisant ainsi « un exploit prodigieux sous la contrainte de la nécessité ». Puis ils déposèrent le navire dans les eaux du lac Triton.

Lorsque le chercheur a pris la décision irrévocable d’accomplir le but que l’âme s’est fixée, il pénètre dans une zone de turbulences intérieures soulevée par son ascèse (une tempête de Borée) durant laquelle, loin des centres d’intérêt du monde, dégagé de nombre de ses croyances et de ses appuis, mais sans aucune visibilité sur son chemin, il se trouve dans une position inconfortable et misérable, comme abandonné du Divin et des hommes. Il lui semble à la fois avoir perdu sa vie et s’être fourvoyé dans sa quête. Il a renoncé, du moins le croit-il, à ses anciens rêves. Il n’est plus soutenu que par sa flamme intérieure.

Il s’agit pourtant d’une période de purification car le bateau des Argonautes est échoué dans le golfe de la Syrte « ce qui lave ». Les mystiques décrivent ces épreuves que l’on rencontre à plusieurs reprises au cours du chemin comme des « nuits », périodes de sécheresse des sens puis de l’âme (des étendues désertes de sable) doublées souvent d’un fort malaise vital (les marais) et sans aucune des « consolations divines » qui leur étaient précédemment familières.

Toutefois, après un temps, le chercheur entrevoit l’issue et il est prévenu d’un signe à venir par des puissances qui se manifestent dans la solitude, protègent le processus de libération, et connaissent tout des épreuves passées du chercheur (les déesses tutélaires de la Libye, « les glorieuses déesses des solitudes »). Une grande force viendra vers lui dotée d’une capacité de perception exacte des vérités de l’esprit « le cheval à la crinière d’or ».  Mais le chercheur ne comprend rien à ce qui lui est dit.

Il s’ensuit une période un peu délicate qui peut lui sembler interminable, douze jours et douze nuits symboliques, le temps d’une période de maturation dans laquelle le « véhicule » (corps, vital, mental) traverse une période de faiblesse et doit être supporté par les forces intérieures engagées dans la quête (les héros durent porter le navire). La personnalité qui normalement « supporte » la quête n’est plus opérative à ce moment puisqu’elle a rendu les armes.

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