ORION

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Le mythe d’Orion décrit un aventurier de la conscience qui « tire » de façon excessive l’ivresse divine dans sa nature qui n’est pas encore prête pour la recevoir.

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En suivant Phérécyde, il aurait été logique d’étudier ce mythe à la fin du chapitre traitant du Minotaure, car cet auteur fait de Poséidon et d’une fille de Minos, Euryalé, les parents d’Orion. Il voulait sans doute signifier que les chutes spirituelles, dans la lignée d’Europe « l’extension de la conscience », peuvent se produire jusqu’à un stade très avancé du chemin.
Toutefois, il nous a semblé préférable de le traiter ici, avec Ixion et les Aloades, tous symboles d’erreurs spirituelles guettant les chercheurs avancés. (Nous verrons les Molionides, représentant également des erreurs majeures, avec les derniers combats d’Héraclès.)

Orion était un grand et puissant chasseur, d’une force prodigieuse, et selon Homère, « jamais la terre aux blés n’avait encore nourri des hommes aussi grands que les Aloades, Otos et Éphialtès, et seul Orion eut plus noble beauté ».
Phérécyde atteste qu’il est fils de Poséidon et d’Euryalé, elle-même fille de Minos.

Mais il existe une autre version plus tardive. Hyrieus, fils de Poséidon et de la Pléiade Alcyoné, reçut chez lui les dieux Zeus, Poséidon et Hermès qui, en remerciement de son accueil, lui demandèrent d’exprimer un souhait. Il répondit que bien que n’ayant pas d’épouse, il désirait un fils. Aussi les dieux étendirent-ils la peau d’un animal, la couvrirent de leur semence, et dirent à Hyrieus de l’enterrer dans le sol et de l’y laisser pendant neuf mois. Et c’est ainsi que naquit Orion.

De son père Poséidon, il tenait le pouvoir de marcher sur les eaux, ou encore, de passer au travers comme s’il était sur la terre ferme.

Orion étant parti pour Chios, s’enivra et viola Méropé, la fille d’Oinopion. Ce dernier, découvrant le forfait, rendit Orion aveugle et le chassa du pays.

Dans une autre version, il était tombé amoureux de Méropé et l’avait demandée en mariage. Mais son père Oinopion était opposé à ce mariage et en reculait sans cesse la date bien qu’Orion ait déployé de grands efforts pour débarrasser l’île de bêtes sauvages. Oinopion était le fils de Dionysos et d’Ariane. Il naquit lorsque cette dernière fut abandonnée par Thésée sur l’ile de Dia après la victoire sur le Minotaure. S’impatientant chaque jour davantage, Orion, sous le coup de l’ivresse, viola la jeune fille. Le père, furieux, le rendit aveugle et l’abandonna sur le rivage.

Certains disent qu’Orion erra longtemps sur la mer Égée, car il pouvait marcher sur les eaux.
Un jour, guidé par le bruit des marteaux des Cyclopes, il arriva sur l’île de Lemnos sur laquelle Héphaïstos avait une forge. Le dieu eut pitié de lui et lui offrit l’aide de son assistant Kédalion pour le diriger. Ce dernier, juché sur les épaules d’Orion, le guida vers le soleil levant dont la contemplation lui permit de recouvrer la vue.
Orion partit alors pour la Crète où il passait son temps à chasser des animaux sauvages en compagnie de Léto et d’Artémis.
Chez Homère, Éos, la déesse de l’aurore, en devint amoureuse et le transporta sur l’île d’Ortygie (identifiée plus tard comme Délos). Mais les dieux n’approuvant pas les liaisons entre déesses et mortels, Artémis le tua d’une de ses flèches.
Dans une autre version, Artémis se serait éprise de lui et Apollon aurait conçu un stratagème pour qu’elle le tue elle-même de l’une de ses flèches. Il défia en effet sa sœur d’atteindre un point noir au loin dans la mer qui n’était autre que la tête d’Orion.
(Chez Ovide, comme Orion se vantait d’être capable de venir à bout de tout animal sur terre, Gaia, en colère, envoya contre lui un scorpion qui le tua.)

Selon Homère, au royaume des ombres, il continuait à poursuivre les bêtes sauvages, celles-là même qu’il chassait de son vivant.

Au même titre que ceux des Aloades (Otos et Ephialtès) et des Molionides (Eurytos et Ctéatos), le mythe d’Orion doit être classé parmi ceux qui concernent des étapes très avancées sur le chemin. De nombreux indices le confirment : Orion est fils d’Euryalé (une fille de Minos) ; il chasse en compagnie d’Artémis et de Léto ; Artémis ou encore Éos en tombent amoureuses ; il se rend à la forge d’Héphaïstos, etc. Autrement dit, il fréquente les dieux, peu ou prou, même si l’on écarte la source tardive où les dieux viennent en sa demeure.
Enfin, chez Homère, hormis Ulysse – car c’est lui qui raconte son passage au royaume d’Hadès -, Orion est le plus beau des mortels, c’est-à-dire le plus avancé sur le chemin de vérité.

Dans la première filiation, il est d’ascendance divine par Poséidon, tout comme Thésée, ce qui indique une manifestation du subconscient.
Dans la seconde, l’insistance sur la filiation divine est encore plus marquée par la mention de trois dieux. Il représente alors le fruit de l’association du supraconscient, du subconscient et du surmental, association qui permet un travail dans les couches les plus profondes de la conscience, le mental physique (chez Hyrieus, fils de la Pléiade Alcyoné, il fut conçu par les semences mêlées de Zeus, Poséidon et Hermès).
Le chercheur, à ce stade, ne sait comment orienter le travail – Hyrieus n’a pas d’épouse – mais celui-ci se poursuivra malgré tout sous l’impulsion des forces les plus hautes de la conscience.

Le nom d’Orion Ωριων (ΡΙ+Ν) invite à considérer « le mouvement juste de la conscience dans l’incarnation ». Sa mère est Euryalé (Ευρυ +Λ) « une vaste liberté » qui provient d’un élargissement de la conscience par le discernement, et son père Poséidon indique une intervention du subconscient le plus haut.
Le nom Hyrieus évoque « un juste mouvement de la conscience dans un état de réceptivité ».
Orion est un grand chasseur, le plus noble de tous les mortels : c’est un « aventurier de la conscience », tendu vers son seul but, avec toutes les qualités du chasseur que nous avons déjà décrites : endurance, consécration, discernement, volonté, etc.
Il marche sur les eaux, signe d’une maîtrise accomplie du vital.

Par son union (peu attestée) avec Sidé « grenade », fruit associé à la couleur pourpre du vital purifié – selon Mère, symbole de l’Amour Divin qui se répand sur la terre – le chercheur prend pour but la purification vitale qui, une fois réalisée, doit se poursuivre par un travail dans les couches les plus inconscientes au niveau du refus de changement fondamental de la matière corporelle (Sidé se fait tuer par Héra qui l’envoie dans le Tartare).

Le chercheur contacte en lui une organisation de « concentration de la conscience » qui est alors gouvernée par la joie dans l’incarnation (car le mot comporte un oméga) (Orion se rendit à Chios gouvernée par Oinopion). Les auteurs qui font d’Oinopion un fils de Dionysos et d’Ariane ont sans doute voulu indiquer que cette joie est une manifestation particulière du vrai Tantrisme qui fait de tous les obstacles des leviers du yoga et embrasse la totalité de la vie pour y trouver la Lila (ou le Jeu) du Divin.
Par « le mouvement juste de la conscience dans l’incarnation », le chercheur veut faire pénétrer cette joie dans la dualité (Orion veut s’unir à la fille d’Oinopion, Méropé, dont le nom qui est aussi celui de la femme de Sisyphe signifie « mortelle ».) Mais bien qu’il ait fait de grands efforts pour purifier sa nature d’importants perturbateurs, il n’est pas encore mûr pour cette forme de joie (Oinopion retarde constamment le mariage, bien qu’Orion ait tué nombre de bêtes sauvages). De plus, dans son impatience, il veut la faire entrer de « force » dans sa nature (Orion, sous le coup de l’ivresse, viola la jeune fille).
Cette erreur de yoga le prive de la possibilité d’utiliser cette structure de conscience pour acquérir la joie et il est obligé de se retourner vers son être intérieur (Oinopion, s’apercevant du viol, rend aveugle Orion et le chasse). Dirigé indirectement par sa « vision » la plus haute, il parvient ainsi à la source de la création des formes nouvelles où il obtient la guidance d’une force qui « prend soin de l’individuation de la conscience » (guidé par le bruit des marteaux des Cyclopes, il arrive à la forge d’Héphaïstos et un assistant du dieu, Kédalion, le conduit vers l’Est).

La « contemplation intérieure » de la conscience supramentale le remet sur le chemin (il recouvre la vue en contemplant le soleil Hélios).
Orion part alors en Crète où il chasse les bêtes sauvages en compagnie de Léto et d’Artémis : le chercheur est parvenu au niveau des dieux et œuvre de concert avec son être psychique et la force de purification qui en émane. Cet état unifié lui permet de s’attaquer aux mémoires archaïques de l’évolution.
Le Nouveau « s’empare » alors du chercheur, mais cette union ne peut perdurer car, si la purification est importante, elle n’a pas été réalisée dans toutes les parties de l’être. Ce manque de pureté ou de transparence font que « les dieux s’indignent lorsqu’une déesse s’unit à un mortel » (la déesse du Nouveau, Éos, s’impose alors à Orion, mais les dieux n’approuvant pas les liaisons entre déesses et mortels, Artémis le tue d’une de ses flèches).

C’est donc la force en charge de la purification de l’être, Artémis, qui met fin à ce « juste mouvement de la conscience », soit comme une prise de conscience directe, soit éclairée par la lumière psychique qui l’y oblige (Artémis est trompée par son frère Apollon).
Ce mythe signifierait donc que ce n’est pas depuis les hauteurs de l’Esprit que le chercheur peut tirer la Joie divine dans l’incarnation. Celle-ci exige une « descente » dans les couches profondes de la conscience afin de les rendre transparentes à l’action de l’Absolu.
C’est pourquoi Orion, « le mouvement juste de la conscience dans l’incarnation » continue à travailler au royaume d’Hadès, dans l’inconscient corporel, même lorsque le travail a pris fin dans le subconscient et le conscient.